jeu à quatre mains

Deux ans sans écrire sur le blog… Deux ans d’hibernation. Pas de regret c’est déjà arrivé, ça arrivera encore. La création est tout sauf un long fleuve tranquille. Il faut s’appeler Monet Picasso ou Matisse pour tracer son sillon sans relâche et encore je ne sais pas, peut être qu’ils ont eu des doutes des peurs, des zones grises, Claude Monet n’était jamais satisfait c’est un fait connu. La peur viscérale de perdre le fil, cela doit arriver aux plus grands.

Alors à une brindille pensez donc !

Deux ans à réfléchir, rêver, prendre des notes, râler déchirer, fuir le vide. Mais le vide c’est aussi la vie, il faut savoir laisser les choses maturer doucement. J’ai du mal. De plus, mon existence a pris un cours nouveau. J’ai regardé le crâne de verre sur mon bureau: Vanité … Je ne supporte plus de vivre en tendant vers un but improbable voir impossible. C’est tout simplement passer à côté de sa vie, la vraie celle qui est tangible. Je n’ai plus le temps d’en perdre.

Alors j’ai fait un grand pas de côté : la pratique artistique devenait un sujet non plus majeur mais contingent. J’ai ouvert les yeux et j’ai vu tout ce qui était enfoui en moi.

Cela a tout bouleversé, mon équilibre interne certes fragile mais immuable, mon phare dans la nuit, ma vie a pris une autre saveur moins égocentrée plus ouverte plus libre et vaste de potentialités. J’ai toujours aimé plus que de raison le monde animal et le monde végétal ; il y a bien longtemps que je fais des câlins aux arbres, que je pleure si une plante que j’apprécie meurt. Cet été mon vieux pied de lavande certainement planté par la grand mère qui habitait là avant moi, un gros pied tout en hauteur qui n’a pas été taillé convenablement et qui s’est hissé vers le ciel m’a quittée. Certainement épuisé de faire monter sa sève du tronc aux branches, et puis cette sécheresse assassine. Il est mort, j’ai caressé ses vieilles branches tortueuses toutes sèches avant cela il m’a offert une dernière et maigre floraison toujours aussi odorante. J’ai gardé son bois et ses fleurs d’adieu. Quand je passe devant l’endroit ou il était planté je suis très émue.

Voilà. Je ne parlerai pas des chats des chiens des oiseaux des lézards… Ce n’est pas le sujet d’un blog d’art.Tout ça pour dire que la vie prend des tournants insoupçonnés rien n’est jamais acquis ou définitif: Une seule constante le changement.

Malgré tout l’an dernier en décembre j’ai exposé de l’artisanat (art modeste) avec une amie de très longue date que j’ai retrouvée (30 ans de séparation… La vie ) ma chair Catherine. Aux « Lunes Nomades » une jolie galerie près d’Ambarès et, surprise j’ai bien vendu. Cela m’a réconfortée, j’ai compris que l’art avec un grand A n ’était pas de saison. Et voilà ma vieille frustration qui s’est réveillée: j’aurais préféré faire les arts décoratifs plutôt qu’arts plastiques. J’imaginais depuis ma petite enfance devenir créatrice de bijoux ou de chaussures, styliste ou encore décoratrice d’intérieur. Je passais mon temps à dessiner des intérieurs, des modèles de robes c’était l’exaltation. Je n’envisageais pas devenir peintre. Je n’ai jamais pensé en avoir l’envergure. Je ne nierai toutefois pas mon gout exclusif pour l’art au sens large du terme, l’histoire de l’art surtout, la beauté et la laideur sublimées, la danse, la musique. Tout cela m’inspire encore de manière totale, c’est toute ma vie. Ce sera toujours le cas.

Catherine suit également cette approche de plasticienne artisane(pour le moment hein, rien de définitif), elle utilise sa formation pour créer des objets poétiques lisses comme des galets, l’art subtil de la céramique, du biscuit. Comme moi avec ma broderie mes tissages, mes teintures végétales qui sont autant d’expériences magiques et surprenantes.L’exposition VDf m’a durablement touchée, l’art textile me sied bien, mieux que la pratique de la peinture qui me fait souffrir, ne me satisfait jamais.

Venons en aux faits, elle est pleine d’énergie Catherine et elle a souhaité travailler sur un projet avec moi. J’ai dit oui sans hésiter, se faire embarquer pour Cythères c’est trop tentant. J’ai toujours aimé les collaborations, les expositions à deux trois et plus si affinités. Souvenir ému de la période folle des Loukoums Rebelles.

Alors nous voilà à Uzeste cet été en période de festival, à exposer dans un lieu minuscule et atypique : une boulangerie galerie coopérative un peu anarchiste! (c’est la couleur de ce village surprenant). Bonjour Monsieur Bernard Lubat.

Un truc improbable comme un essai pour une autre fois, un autre lieu… Mais ça m’a remise en marche il a fallu que je travaille sérieusement sur la série de bijoux communs, en l’occurrence des broches faites de céramique blanche et de tissus, brodées aux couleurs végétales toutes douces: Elle et moi réunies dans le bonheur du « faire » à quatre mains.

Créer sans se mettre la rate au court bouillon, c’est quelque chose de merveilleux.

Traversée du désert

C’est comme cela qu’on nomme une période creuse chez un artiste. Cela veut dire qu’il y a un début et forcément une fin, lorsqu’on arrive exténué dans des contrées moins hostiles avec le retour du vert, de la vie et d’un point d’eau claire ou l’on peut se rafraichir. Chair création.

J’ai beaucoup réfléchi, je ne fais que ça! Finalement ce n’est pas du tout la première fois que je reste muette et immobile incapable de produire quoi que ce soit.Je dirais même que c’est une histoire de cycles alternant sentiment de puissance, créativité accrue enthousiasme délicieux

puis dépression accompagnée d’une lenteur de réflexion, de manque de motivation et d’une dévalorisation douloureuse. Je ne sais pas comment ça se passe pour les autres( enfin si un peu..)Pour moi c’est ainsi. Peut être que c’est l’une des raisons pour laquelle je n’ai pas « réussi »à percer? On ne saura jamais. En même temps les problèmes psychiques et l’hyper sensibilité chez les artistes c’est courant mais pas inévitable (attention au mythe de l’artiste torturé alcoolique qui finit par se suicider dans la déchéance la plus totale). Le cliché a la dent dure.

Je me sens mieux maintenant je crois que la grosse crise est passée. Il me faut le temps de retrouver mes marques, me relever. Je dois m’atteler à une nouvelle thématique et trouver un but, des aspirations. C’est un peu comme l’appétit : on peut le perdre et ensuite le retrouver. C’est aussi simple que ça. Mais tout de même c’est angoissant car se pose la question de savoir si la source est définitivement tarie ou seulement encombrée de pierres, ce qui fait qu’elle ne coule plus mais de manière temporaire. Peut être que mon prochain post parlera d’une nouvelle série, ou de croquis, de petits bouts de tissus cousus et brodés, je ne sais pas. J’espère.Il faut que je dégage chaque pierre une à une, c’est fatiguant.

En attendant je me suis remise à la couture, je fabrique des nuisettes des petits hauts des robes.

Aujourd’hui je vais poster quelques clichés de l’exposition VDf. Je me suis rendue compte que je ne vous avais pas montré ce moment qui m’a bouleversée durablement et qui a peut être contribué à rendre difficile la reprise des mes projets artistiques : c’est arrivé à deux de mes amies. Elles m’ont toutes deux rassurée et je leur sais gré de m’avoir permis de relativiser cette période grise.

Pourquoi grise d’ailleurs? Le gris est une couleur magnifique sourde délicate modeste, qui s’accorde avec toute les autres. Mes lingettes déclinaient toute une gamme de gris qui offrait au spectateur un espace apaisant et subtil. C’est ce qu’on m’a dit.

Alors je vous montre ça?!!

affiche

Les calebasses

et

Les poupées, peuple des femmes
vue d’ensemble du grand tapis
autre vue coin des bonnes femmes et poupées en grappe

aussi

poupée gros plan
Calebasses gros plan
Trois tentures en conversation
l’artiste ka Diomandé

Voilà… La suite de l’aventure….

Bientôt!

Post partum

J’ai décroché en novembre, déjà plus d’un mois…

En fait, ce sont les Simones qui ont fait le décrochage moi j’avais un rendez vous médical de très longue date impossible à déplacer. J’ai regardé mes tentures et tout le reste entassées dans le salon, un peu triste. Sincèrement je pensais qu’exposer après tant d’années me nourrirait m’apporterait du bien être et de l’espoir. C’est exactement le contraire qui s’est produit. Il faut dire que je couvais depuis bientôt trois ans un « down » d’ampleur nucléaire, le projet VDf m’a servi de pare-feu c’est tout. Ce fut agréable, fertile et tellement prenant d’assembler ces lingettes soir après soir dans le dénuement relationnel le plus total avec une fille prête à exploser en mille morceaux tous les quatre matins.

J’ai tenu bon, j’ai traversé la crise accrochée comme une moule à son rocher ni les vagues immenses ni les vents mauvais ne m’ont déviée des objectifs que j’avais défini : finir cette série, l’exposer quelque part, tenir bon pour « supporter » Saskia.

Chaque soir au coucher épuisée je me disais : « ne craque pas , tiens bon… »

Certains vont encore me dire que je suis trop dans l’intime en racontant ça….

Dire ce qu’on ressent, ce qu’on pense, raconter des petits bouts de sa propre histoire ce n’est pas pour moi d’une impudeur incroyable. Jamais je ne parlerai de mon intimité vraie parce que je suis farouchement attachée à mes secrets, ce que je distribue sans arrière pensée c’est le sommet de l’iceberg rien d’autre : un ressenti qui puisse résonner en chacun, la part d’universel en moi. Le chagrin, la solitude, les rêves brisés, tout ça n’est pas simplement humain? J’ai besoin d’échanger, grâce à ces écrits personnels je me sens en phase avec les lecteurs et lectrices, surtout celles et ceux qui portent leurs peines en silence, « Les lapins sans fourrure ».

Je suis leur porte parole.

Est ce que j’ai fait des révélations sur ma vie sexuelle (ou pas) sur mes penchants secrets mes fantasmes, est ce que j’ai décrit les abus que j’ai subi en donnant des détails précis et cliniques, est ce que j’ai déjà offert en pâture des pans croustillants de mon parcours de femme?

Non.

Donc je balaie d’un revers agacé ces critiques qui m’ont tout de même troublée. Je me suis dit « ma pauvre fille tu déballes ta vie devant tout le monde sans aucune pudeur c’est dégueulasse », oui j’ai été prise d’un doute sur l’utilité de mes écrits ce n’était donc que de l’indécence auto centrée? J ‘ai ressenti un sentiment de honte. Mais bon c’est le jeu, tu donnes tu ne reçois pas que des roses.

Alors j’ai décidé de continuer parce que je ne suis qu’un grain dans l’univers (j’arrive à placer cet adage dans presque tous mes posts!) Et je pense sincèrement qu’en polissant ce grain minuscule en l’observant en le décrivant je communie avec mes lectrices et mes lecteurs, je partage de l’humanité et cela me fait du bien.

On ne choisit pas ses lecteurs. Certain(e)s peuvent avoir des motivations inavouables faites de curiosité malsaine : « Quand est ce qu’elle crache le nom de sa « maladie », elle s’est faite violer ou pas? Jamais, parce que cela n’a aucun intérêt, justement tout est là. Pourquoi nommer les choses précisément je préfère en faire le tour, en décrire les effets, les conséquences ainsi de nombreuses personnes peuvent se sentir concernées par ce que je dis de la douleur, de la cruauté de la vie, de sa beauté sauvage aussi.

Je dois bien l’avouer si ce blog n’avait qu’un but artistique je n’écrirai pas ce post et il y en a d’autres qui sauteraient. Dans la création, dans ce processus fragile il y a des creux des faiblesses des vides, et même des trous noirs. On ne peut pas raconter que les phases d’excitation de trouvaille unique, d’action forcenée. Cela ne se passe pas comme ça.

Après VDf et l’exposition j’espérais rebondir comme une kangourou. Dans un fondu enchainé artistique du plus bel effet. Ce n’est pas exactement ce qui s’est passé. J’ai réussi à mobiliser mon énergie pour construire un série de petits formats à l’acrylique ( je suis masochiste, j’essaie de vendre mes travaux artistiques sur des marchés de Noël en belle courge royale que je suis, il vaudrait mieux que je me mette au « food Art » dans ce cas ).

Pour l’occasion, en un petit mois j’ai produit toute une série faite de nus et de paysages, deux thématiques que je n’ai pas abordé depuis les beaux arts. Concernant le paysage, ce sujet me titille depuis quelques années sans oser l’aborder. Bon ce n’est pas du « grand art » ni de la création made in Peintresse Ka, j’avais juste envie d’être invisible de me fondre derrière mon sujet avec modestie.

J’ai dessiné des pins de l’eau, un ciel laiteux des corps nus. J’ai peint les Landes que j’aime tant. J’ai tracé ces formes simples archétypales et rassurantes, des arbres élancés, élégants, un lac turquoise la vie rêvée. Tout ce que j’ai envie de rejoindre pour la dernière phase de ma vie, et ben oui…

Postpartum?

Après la seule « grande » exposition que j’ai fait en 2003 à MixArt Myrys je suis tombée enceinte donc je n’ai vraiment pas eu le temps de me poser des questions sur la suite à donner à ma carrière. Je ne savais pas dans quoi je m’engageais au niveau émotionnel mais aussi au niveau physique. J’ai arrêté de peindre pendant toute ma grossesse et après la naissance de Saskia j’ai acheté un Mac d’occasion, une tablette graphique pour renouer avec la création j’ai également produit de minuscules tableaux que j’ai appelé mes « kitchen paintings », je les ai peint sur un coin de table dans ma cuisine.

La suite? j’ai découvert les réseaux sociaux et les blogs que l’on peut nourrir au quotidien avec une production réelle ou numérique, des réactions immédiates de lecteurs assidus et très réactifs, c’était grisant. Ce fut la période ArtistikkkbranletA sur Arte Blog dont j’ai déjà parlé, entre enthousiasme et désillusion.

Postpartum?

En 2021 la conjoncture est très différente. Je travaille de manière régulière (on va dire plutôt comme un métronome) cela depuis 2013. L’art est devenu quotidien et finalement moins investi de fantasmes puisque je produis avec régularité. J’ai le projet d’exposer mais cela n’est pas ma priorité. Je préfère faire que montrer. C’est la rencontre de Katia qui m’a donnée envie de plonger dans l’eau froide. Merci Katia de m’avoir poussée un peu, je ne regrette pas !

L’exposition elle même s’est bien passée, j’ai eu quelques visites émouvantes le jour du vernissage notamment, et aussi pendant le temps de l’exposition. J’ai ainsi retrouvé une amie perdue du temps des beaux arts on ne s’était pas vues depuis plus de 30 ans! Comme c’était à Saint Macaire je n’ai pas pu aller constater si j’avais des visiteurs, échanger avec eux, je ne conduis pas à mon grand regret. Mais le livre d’or contient quelques petits mots adorables et encourageants qui font chaud à l’âme. J’ai bien fait de faire des petits formats c’est eux que j’ai vendu gagnant ainsi quelques sous, ce qui n’est jamais à dédaigner.

Alors…. Quoi?

Nous sommes en 2021 je n’ai plus quarante ans mais cinquante huit, la conjoncture est assez sombres et ce n’est pas un petit évènement personnel qui peut changer la couleur du temps. J’ai une grande fille qui va passer son baccalauréat option Arts parce qu’elle désire devenir décoratrice ou architecte d’intérieur. Mais avec quels moyens, je ne peux vraiment pas assumer ses études seule, juste l’aider un peu. Il faudra donc qu’elle travaille fasse des études en alternance ou les différer, on est pas dans la caste des petits bourgeois.

-Saskia: « Maman je veux faire Met et Penninghen à Paris, l’inscription n’est qu’ à 5000 euros steupléééé . »

-Moi: « mais bien sur ma chérie cherche un appartement je me charge du reste… »

Quand on a pas l’argent il faut garder un peu d’humour… N’empêche, elle va devoir développer des compétences que les enfants gâtés ne connaissent pas c’est bien, j’ai confiance en sa pugnacité et son courage. D’autre part je vais allègrement vers mes soixante ans. Et comme j’ai vécu à rebours (chaque année vécue est une année gagnée) le résultat c’est que je ne me suis pas rendue compte que je vieillissais… La blague!

« Tout à coup » je réalise que je vais rentrer dans la dernière tranche, my godness ! Ce ne sont pas les rides qui m’angoissent ni la perte évidente d’un pouvoir de séduction illusoire. Pouvoir qui a été plus un fardeau qu’un avantage pour moi. Je me rends compte brutalement que la réalisation de mes rêves chimériques, ceux qui m’animent depuis la plus tendre enfance ont une durée de péremption qui se rapproche et je me dis : « alors tu seras donc passée à côté de la vraie vie, sans la voir sans la sentir, sans en jouir de manière directe toujours à la poursuite d’une chimère inaccessible ? » Vertige.

Et ça veut donner des leçons de sagesse?!

Je sais que ce n’est qu’ une période à l’acide qui passera (privilège de l’expérience), mais en attendant je bute contre quatre murs qui m’enserrent et m’étouffent. Vidée, complètement épuisée par les combats permanents que je mène depuis 1989 non depuis 1963 en fait.

Comment font les gens?

Le projet « corps noir » est trop grand pour moi pour le moment, je n’ai pas la force de le porter, et surtout je n’ai pas du tout envie de démontrer ni de dénoncer quoique ce soit. Je veux avoir la rétine qui pétille de couleurs, de matières oui c’est ça, juste la matérialité la réalité d’un bleu indigo d’un jaune de Naples. M’en mettre jusqu’aux joues, comme quand j’avais 5 ans.

Dans le désert, il ne sert à rien de crier. Alors.

« Faire de la peinture comme on respire, comme on regarde un feu de manière hypnotique… »

Sans aucun autre but que celui de me sentir vivante.

Oui je veux bien, oui.

Dés que je pourrai.

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Voici quelques tableautins que j’ai fait au mois de Novembre pour le marché de Noël du 04 décembre 2021. J’aurais mieux fait de rouler des crottes en chocolat.

I’m a late bloomer…

L’effort paie c’est ce qu’on dit aux enfants mais les enfants préfèrent jouer et ils ne comprennent pas. J’ai longtemps été une enfant je dirais même que j’ai gardé mon âme d’enfant et le sens de l’effort, du travail je l’ai acquis tardivement. Tout semblait facile.

Passé: J’ai brulé ma vie pour vivre des sensations éphémères et dangereuses j’en avais besoin. Un jour je me suis fracassée en plein vol me retrouvant à terre alors là oui d’un coup j’ai compris. Aujourd’hui tout ça est loin et j’ai vécu plus longtemps après le fracas qu’avant ce qui est en soi une vraie performance. Je dirai que mon art c’est avant tout de rester en vie cela prend beaucoup de temps et ce n’est pas spectaculaire.

Présent: nous sommes en Juin 2021, et le temps est très chaud, au fond de l’horizon je vois de gros nuages en forme de champignons nucléaires, volutes de chantilly bleutées tirant sur le gris. J’aime tellement regarder le ciel il vous remet immédiatement à votre place de grain dans l’univers.Radical. Vous avez essayé de peindre des nuages?

Rappel: il y a quelques mois pour le jour de mon anniversaire Katia m’a appelée et m’a annoncé que j’étais choisie pour faire une exposition chez les Simones… Impossible d’imaginer un plus beau cadeau que celui là, Katia, son sourire malicieux et sa voix chaleureuse. Nous avons la même vision du monde un peu douloureuse et remplie d’espoir. C’est elle qui est venue me chercher, me pousser dans mes retranchements, qui m’a persuadée que je pouvais le faire que c’était le moment… Allez fonce!

J’ai commencé à regarder mon projet VDf de manière globale et j’ai listé ce que je devais finir sur quoi je devais réfléchir. Depuis j’y travaille tous les soirs je ne vois pas trop le paysage, je fonce tête baissée afin d’être au maximum de mes capacités pour Septembre. Car cette exposition commencera début septembre.

Mais quel bonheur.

Pas d’exposition depuis Décembre 2003 … J ‘ai créé bien sûr, je ne suis pas restée les bras croisés bien au contraire mais, je n’ai plus eu l’occasion de montrer mon travail dans de bonnes conditions. J’ai fait des décors pour des spectacles de danse, j’ai créé un mandala pour une performance de paix et de concorde à Saint Macaire justement, avec une professeur de danse indienne Karine une femme adorable. J’ai fait ce que j’ai pu dans les limites de mes possibilités. Jamais assez à mon gout avec toujours cette sensation de frustration permanente. Comme si le temps jouait contre moi. Le temps de la féminité avec ses journées à rallonges, toutes les tâches à accomplir pour les autres, le sacrifice permanent de soi, de son être profond. Sans jamais la moindre gratification pour ce sacrifice consenti.Comme si tout ce que nous faisions pour les autres était un dû.

Genèse du projet VDf : c’est arrivé comme un coup de tonnerre, j’avais pris la sainte habitude de travailler tous les soirs chaque jour de la semaine du mois de l’année. ceci depuis Janvier 2013 l’année de mes cinquante ans. J’étais épuisée mais je ne lâchais rien. C’est alors que Saskia est rentrée du collège et me l’a annoncé: Nathalie sa professeur de danse avait été victime d’un féminicide brutal. Nathalie était morte parce qu’elle voulait vivre, partir. Ainsi non seulement les femmes se doivent de prendre tout en charge de se sacrifier, mais elles n’ont pas le droit de décider de se libérer du joug. Elles ne s’appartiennent pas en fait, elles sont objets et non sujets. Un homme peut décider qu’elles ne vivront pas sans lui, hors de lui.

Est ce qu’une femme peut commettre ça?? Oui il y en a forcément mais je crois que c’est au alentour de 3 pour cent, tout à fait anecdotique au regard des meurtres perpétrés par le patriarcat.

En moi ce fut comme une tornade, un sentiment de colère mêlé de peine immense, de vide de gâchis.Saskia était choquée elle répétait: »pourquoi Maman? »

Oui….Pourquoi?

Je me suis dit « comment je peux faire vivre cette émotion, lui rendre hommage? ». Nous (Nathalie et moi) avions discuté quelques semaines auparavant, assises sur le tapis de danse, dans son studio aux mille glaces. Elle fumait une clope parlait vite de son projet de sa passion du spectacle qui était prévu, très intime très lié à son histoire familiale elle était passionnée et passionnante j’étais charmée. je lui avais montré ma proposition(sous forme d’un gros dossier de croquis), elle avait trouvé cela bien et je m’étais mise au travail joyeuse. Ce n’était pas une amie c’était plutôt une sœur, une femme artiste qui se bat pour exister, mais je ne savais pas quel calvaire elle vivait au quotidien. Chacune avec sa peine bien rentrée, il ne faut montrer que le sourire aux dents bien brillantes et pointues de louve, cacher l’agneau entravé : pudeur.

Alors c’est arrivé « tout seul « comme souvent chez moi. Je réfléchis beaucoup en amont mais sans objet sous forme de prises de notes informelles ou de croquis numériques, de regards furtifs sur la beauté du monde, de larmes salées qui coulent et ruissellent tendrement. Tout peut faire sens, il suffit de faire les liens

J’avais ces centaines de lingettes que je conservais depuis des mois alors j’ai commencé à les assembler en pensant à elle et son sacrifice total, sa disparition insupportable. En fait je la connaissais peu mais elle devenait « Tout »pour moi , elle était à présent dans son absence le symbole de toutes nos frustrations. Je reliais ces petits bouts de lingettes grisâtres ensembles, cela n’avait pas encore de sens, j’en avais juste besoin. Relier, assembler pour comprendre pour donner une signification aux éléments éparpillés à la désintégration symbolique du Monde.

C’est cela oui: Donner du sens à sa mort absurde. Du sens à ma vie minuscule et invisible. J’avais des problèmes aussi dans ma vie personnelle mais pas à ce point, pas au point de craindre pour ma vie, j’étais juste ignorée traitée comme une femme psychologiquement fragile et instable. Comme de nombreuses femmes je me sentais niée. Une année est passée et j’ai continué à coudre tous les soirs ainsi le projet est apparu comme par magie, je ne vais pas en reparler ici parce que j’ai consacré plusieurs posts à expliquer la substance de cette démarche. Vous pouvez y avoir accès ici :

Le grand dais mesurant 8,80 m doublé de toile de métis(lin et coton).

https://lapeintresseka.com/2019/01/19/over-the-rainbow/

et là:

https://lapeintresseka.com/2020/02/19/des-choses-minuscules/

Happy End? J’ai enfin quitté l’homme avec qui je vivais, je suis restée seule dans la maison avec ma grande adolescente de fille. Cela a été très difficile de vivre avec elle la confrontation de femme à femme en devenir. J’étais, je suis le rempart, sa seule référence. Celle qui doit tenir coute que coute contre les vagues qu’elle balance obstinément sur moi. Pas question de me noyer…

Je me suis construite une vie monacale, répétitive qui pourrait paraitre ennuyeuse de l’extérieur mais il n’en est rien, je n’ai jamais été aussi concentrée sur mes buts mes aspirations et cette exposition qui arrive comme un cadeau du ciel…. Je ne cherche pas vraiment à me remettre en couple. Je ne sacrifierai plus rien pour un autre être quel qu’il soit, seule ma fille peut me faire abandonner mon ouvrage quand elle a besoin de moi de mes bras, de mon écoute. Je suis entièrement là pour elle j’ai choisi d’être mère et je l’assumerai jusqu’au bout.

Je travaille chaque jour, je dois peaufiner mes broderies, coudre la doublure affreusement lourde du grand dais de peine, peindre le visage de chacune des poupées qui formeront l’essaim aérien dans un coin de mon installation.Et commencer à envisager « l’artist-stament », le texte de l’exposition les photos pour le flyer toutes ces choses que je déteste gérer (seule la tâche de création m’intéresse ), je ne suis douée que pour ça alors me mettre en lumière… Mais bon je vais y arriver je dois le faire c’est tout. Je n’ai plus d’état d’âme.

Je le vois  » in situ » ce travail de plusieurs années cette réalisation méthodique, modeste, têtue comme je le suis. Dans la belle salle galerie des Simone, la mise en scène je l’ai déjà dans la tête et ça me fait sourire toute seule.

Maintenant j’espère que le public se laissera embarquer dans mon univers, je crois qu’on peut y trouver plusieurs choses à ressentir,enfin… J’espère. Il y a un moment ou il faut lâcher prise, montrer c’est perdre la maitrise.

Louise B me regarde et me sourit. Ok ça va le faire!

Je suis entrain de réaliser mon rêve d’enfant. Plus que jamais. Quand j’étais plus jeune et que j’ai eu l’occasion d’exposer à Paris, Bruxelles ou Toulouse dans des lieux underground et branchés je ne réalisais pas vraiment ce que je faisais là, je n’étais pas complétement satisfaite de ce que je montrais parce que je ne travaillais pas suffisamment. C’était plus une affaire de brio que de démarche réfléchie, de geste intimement vécu jusqu’au tréfonds de mon ventre. Maintenant il est question d’un travail qui abime mes doigts, mes yeux et mon dos.

Un acte libérateur et juste.

Comme quand Nathalie tournoyait en arabesque folle pour montre à ses élèves le mouvement parfait.

Des années de travail pour le tenir ce mouvement là et encore ….

Je suis une femme d’abord oui. Je suis une artiste une peintresse qui se bat pour montrer qu’elle existe hors des sentiers communs. Âgée oui , je suis une fleur tardive: « a late bloomer » comme disent les anglo-saxons. Mais toujours vivante.

Je remercie l’équipe de Simone et les Mauhargats pour leur confiance, je ferai en sorte de donner le meilleur pour que nous puissions partager un moment délicat d’art de poésie.

Et alors? Manger des nuages…

J’ai enfin terminé la broderie au point bourdon de ma dernière tenture qui est en forme de croix allongée. Pour les dernières œuvres je suis sortie du cadre rectangulaire. J’ai voulu évoquer des croix car le destin féminin c’est souvent un parcours douloureux rarement couronné de gloire ni de reconnaissance. Aujourd’hui les mentalités changent doucement et l’on tire de l’oubli des peintresses, des écrivaines des ingénieures. Toutes effacées, oubliées , parfois spoliées (dans le domaine scientifique notamment) Camille I love you.

Je commence donc la dernière phase de cette série: doubler le dais fait de lingettes celui qui mesure plus de 8 mètres et qui sera la pièce maitresse de l’exposition. J’assemble 8 mètres de drap lourd (métis) au dos des lingettes. Impossible de coudre cette doublure en une fois, alors j’enroule le dais je maintiens la longueur avec deux ficelles et j’ajoute mètre par mètre de tissu. Ce n’est pas difficile c’est juste un travail de patience et de précision. Mon annulaire de la main droite semble creusé au niveau de la pulpe du bout du doigt cela forme un petit cratère dur et sec, c’est la trace de l’aiguille que je dois enfoncer dans les multiples couches de matière. L’art laisse son empreinte dans ma chair!

Finalement dans le monde obscur ou nous sommes plongé(e)s cette tâche de longue haleine est parfaitement adaptée. Je ne me demande pas ce que je vais faire le soir j’attrape mon gros tas de tissu je le pose sur mes genoux et j’assemble en écoutant un podcast d’Arte, ou une série sur Netflix.

Une fois que j’aurais terminé ce travail il faudra que je mette tout ça en forme pour pouvoir l’exposer. Parce que pour une fois je suis vraiment convaincue par ce que j’ai fait. Je veux le montrer j’ai les mots pour le décrire, tout fait sens. J’ai passé mon été à faire des croquis de scénographie parce que pour une fois et alors que je n’ai pas encore fini, j’ai déjà une proposition de lieu d’exposition sérieuse. Et même si cela ne fait pas là je suis prête à aller taper à différentes portes pour trouver un endroit, je me sens solide pour défendre ce projet. Ce qui m’empêche ce sont plutôt les conditions actuelles de vie, l’incertitude qui règne partout, cela a quelque chose de terrifiant de ne pas pouvoir se projeter.

J’ai déjà commencé une nouvelle série dont j’ai parlé dans le dernier post « Strange fruit », c’est encore très flou mais petit à petit en relisant des textes, en faisant des croquis j’avance. En fait ce travail je le vois déjà terminé ce qui est assez étrange cela ne m’est jamais arrivé, mais je sens que je vais devoir mettre beaucoup de moi même et ce n’est pas exactement ce que je projetais de faire après VDf, ce que je visualise: de grandes toiles de tissu qui pendent avec d’immenses portraits peints dessus à grands traits avec beaucoup de couleur une envie de Gauguin, du douanier Rousseau de Rembrandt, des poupées de grande taille qui pendent également « les fruits étranges » , une installation numérique avec les textes de mon ami Régis Roux et des flots d’images celles que j’aurais produit et d’autres qui sont dans le domaine public. J’avoue, j’en ai assez de ne parler que de problèmes qui me brulent parce que je n’ai pas de peau, j’en ai marre d’incarner la cloche impériale résistante. Je rêverais de peindre une desserte rouge, un bouquet de tournesols, quelques pins désolés un soir de Septembre avec une belle palette de mauve de jaune de chrome de rouge sombre, une palette qui ne vaut que pour elle même: la couleur en majesté.

Cela voudrait dire que j’ai trouvé le repos mais je ne suis pas sure que cela soit mon destin, peut être. Je ne comprends pas notre monde, ni les complotistes que je trouve ridicules voir dangereux ni ceux qui suivent aveuglément les restrictions gouvernementales sans se poser de questions sur la perte de nos liberté, sur le sens de cette vie qui n’en a plus enfin pour moi. Je ne comprends ni n’accepte pleins de choses que je trouve violentes et injustes en fait, mon petit confort mon bonheur individuel ne peut pas me suffire.

Ou sommes nous là maintenant?

Mais bon je dérive, ce blog parle de couleurs, de lumière, de travail acharné, d’inspirations fugaces et trompeuses. Ce blog pose des questions d’ordre plastique. Toutefois l’artiste(moi en l’occurrence) vit dans un monde donné il n’est pas hors sol. Et je vois bien que de nombreuses formes d’art sont entrain de s’étioler jusqu’à disparaitre c’est épouvantable. Je suis solidaire des artistes qui ne peuvent plus travailler. Les arts vivants sont les plus touchés mai pas que… Je connais des artistes peintres qui restent secs en ce moment, et je les comprends parce que je fournis un effort monumental pour continuer c’est ma santé mentale qui dépend de ma production alors je « force » l’inspiration je me fais violence, pas envie? « ta gueule tu continues! »…On a que cette vie et j’ai passé le plus clair de la mienne à me battre pour survivre alors j’ai pas le temps pour la dépression profonde. Covid ou pas, confinement ou pas, solitude absolue ou pas, j’avance.

Bien sur je me sens triste et déprimée, pas la peine de se mentir, mais je ne suis pas la seule je crois !

J’ai envie d’un grand repas avec les ami(e)s la famille, une grande table couverte de victuailles variées du vin de l’herbe des gâteaux et du pain frais. J’ai envie d’une journée chaude qui s’étire lentement avec des rires d’enfants et des chaises longues parsemées dans l’herbe. Une fête pour rien, juste pour se retrouver.

Cher(e)s lectrices et lecteurs je vous souhaite une belle année nouvelle que l’énergie du vent nous emporte.

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La dernière tenture avec des vignettes décrivant le déroulement du processus de création. Automne 2020

 

Quelques croquis et travaux numériques autour du « corps noir », qui peut se déployer en » corps étranger » pour ouvrir la problématique. Ce qui n’est pas blanc, occidental est « autre ». Plusieurs axes de travail de ce corps consommé vendu annihilé: le corps nourricier, le corps érotisé, le corps envié et donc abimé et traité comme un déchet, le corps en majesté pour renaitre. Il y a de quoi faire …. L’étoile brillante de cette série: Sarah Baartman dite la Vénus Hottentote dont l’histoire à la fois fascinante et terrible me permettra de relier entres eux chaque parti pris. Voilà ou j’en suis, ce n’est que le début.

Strange fruit…

Mon dernier billet date de Février.  Depuis je n’ai rien écrit, j’écris peu ces derniers temps. Je ne sais pas si on peut parler d’un épisode thymique profond, je n’en ai pas l’impression. Pourtant mon rythme est lent je ne me sentais pas capable jusqu’à il y a quelques semaines d’innover de réellement créer du moins le côté « surgissant » de la créativité, la pulsion inconsciente qui vous conduit à inventer un monde l’extraire du néant.

Ce qui m’a touchée ces derniers mois ce ne sont pas des éléments de ma vie personnelle, en tout cas pas d’éléments  tangible. Il est par contre un état nouveau qui commence à naître en moi, un état de  tranquillité de puissance, d’indépendance que je n’ai tout simplement jamais connu. Je me situe en tant que personne aux contours affirmés, pas liée pas courbée pas accrochée à un autre être. Je n’ai pas envie non tout simplement pas besoin de reconstruire ma vie en couple. Je goûte les joies du célibat volontaire, être jugée comme une vieille ménopausée solitaire même pas peur!! Je sais ce que je ne veux plus et les hommes, ceux que j’ai pu côtoyer ne semblent pas m’offrir cette union libre égalitaire à laquelle j’aspire désormais. Les hommes de ma génération  ont été élevé aux mamelles du patriarcat (si je puis dire!)  ils ne s’en rendant même pas compte, c’est intériorisé c’est assourdissant. Ayant tant donné de moi même et plus encore jusqu’à sacrifier ma vocation, je ne peux tout simplement plus me plier  davantage.

C’est un élément qui mérite d’être approfondi parce qu’il y a un lien fort entre ce nouvel état mature et un approfondissement de mon art dans des détails qui ne m’intéressaient pas avant. Je me doute que ce que je fais ne sera jamais mis en lumière mais je sais que je dois continuer à peaufiner mes projets les rendre le plus intelligibles, maîtrisés.

Mais revenons à l’état de ce qui m’écorche vive : celui du monde, de la terre. En mars, mi-mars nous nous sommes retrouvé(e)s confiné(e)s. En France, en Europe …Partout dans le monde en fait. Comme une grande terreur qui s’est abattue sur les peuples, comme un voile de crêpe noir paralysant. En France, la terreur  a pris une tournure dictatoriale : impossible de sortir sans attestation, des rues vides des villes vides. Un gouvernement qui ment qui gesticule improbable et ridicule, dangereux. Mais tout cela vous savez, vous l’avez vécu comme moi… Peut être pas de la même façon. Pour moi la privation de liberté provoque des troubles importants beaucoup d’angoisse, je ne peux pas obéir de manière aveugle sans comprendre sans que cela soit absolument justifié : je ne peux pas. La bonne surprise c’est que j’ai pu vivre en harmonie avec ma fille jour après jour l’une et l’autre ensembles, dans notre île avec nos deux bêtes aimées. Ce n’était pas gagné d’avance aux vues de nos caractères explosifs, j’ai pu finir ma grossesse il me manquait presque deux mois …

Et puis il y a eu la mort de Georges Floyd, afro américain qui a perdu la vie en direct filmé par un smartphone, mort à plat ventre sous les genoux d’un policier insensible fort de son droit de sa supériorité d’homme blanc représentant la loi. Je déjeunais et j’ai stoppé cette vidéo quand je me suis rendue compte que je regardais quelqu’un en train de mourir. (Il n’y avait rien qui signalait l’agonie de cet homme), choquée  et foudroyée je me suis comportée comme un zombie toute la journée.

Tout est remonté, tout ce que j’oublie volontairement pour pouvoir vivre. Le début de ma vie, moi comme embryon dans ce ventre tendu. Moi comme scandale absolu, comme souillure. Ni noire ni blanche.

Alors quoi? Qui?

Enceinte à 17 ans… D’un NOIR. Annie Van de Walle. Ma mère.

Ma mère a fait fort et c’est dommage qu’elle ait mis toutes ces forces dans cette grossesse pour ne plus jamais assumer par la suite les conséquences de ses actes, de ses choix : moi en l’occurrence.

Mon père cet être idéalisé qui a supporté l’humiliation, le jugement parce qu’il aimait ma mère, parce qu’il m’aimait je lui voue un amour absolu et définitivement perdu. Je vous ai peut-être déjà conté cet épisode cuisant ?? Je ne sais plus j’ai eu trois blogs successifs et il y a donc peut être des redites…Voilà l’anecdote:

Ma mère va chercher mon père à Paris, ils arrivent ensembles en train à Saint just en Chaussée la ville proche du petit village de l’Oise ou vivent ma grand-mère et mes arrières grands parents.

C’est un moment fort et attendu, cette présentation est cruciale pour la suite. Tout l’imaginaire des deux parties est à l’œuvre: Un noir….Une famille blanche.

De ce que m’a rapportée ma mère, ils sont descendus du train. Mon père superbe comme toujours vêtu d’une chemise noire et d’une veste de costume en daim fauve. Ma mère beauté juvénile du nord grosses joues pâles fierté d’amoureuse transgressive.

Il s’est avancé au-devant de ma famille qui les attendait, il souriait et puis il n’a pas compris le groupe a continué passant devant lui sans répondre à son sourire  sans s’arrêter à sa hauteur. Ayant honte de montrer qu’ils côtoyaient un noir, que leur fille, petite fille avait commis le pire acte qu’elle pouvait imaginer : mélanger deux races par nature incompatibles, coucher avec un nègre. Ils n’ont pas pu le recevoir, l’accueillir dignement. Pour étayer mon propos et montrer que non je n’exagère pas  je me réfère à un petit documentaire trouvé sur l’INA datant de 1961 (deux ans avant ma naissance).Il faut les entendre ces braves gens des années soixante, les colonies s’écroulent mais le sentiment de supériorité de différence est là crue brutale assumée. C’est très difficile à entendre mais cela m’a aidée à comprendre cette réaction absurde presque comique au fond.

documentaire de l’ina :racisme en France 1961;

Mon père était très fier(d’origine noble il avait l’habitude d’être respecté) mais il a ravalé sa honte, il a continué à faire bonne figure a montré sa bonne éducation, il a même fini par être adopté par ma grand mère qui l’adorait ce jeune homme raffiné et très sérieux dans ses études.

Qui est le sauvage?

Cette mort-là (celle de Georges Floyd) balancée comme celle d’un animal, cette mort qui s’additionne à toutes autres m’a bouleversée.

L’objectivation du corps noir.

J’avais travaillé sur l’Afrique en 1994/95 pour surmonter la mort de mon Père, comprenant que jamais il ne me serrerait dans ses bras qu’il ne m’aiderait pas à faire le lien avec cette culture qui fait partie de moi et que j’ignorais totalement. Il est parti j’avais un an et quelques mois il est mort j’avais 31 ans et quelques mois, je l’ai toujours attendu en vain.

C’est une plaie béante en fait, impossible à suturer alors parler de cicatrice, de résilience face à cette abyme de souffrance est absolument inenvisageable. Je vis avec. C’est tout. Malgré tout.

J’ai quasiment terminé mon projet VDf, depuis plus de six mois je reprends chacune des créations textiles et je les peaufine j’ai également cousu une cinquantaine de poupées  pour mon installation. Il faut maintenant (je me suis donné les vacances d’été comme date butoir)  imaginer la scénographie de cette œuvre totale en la mettant par écrit et en travaillant l’espace,  le regard du spectateur la  mise en lumière les sons. Ensuite je devrai écrire le texte explicatif et effectuer les démarches de lieux pour exposer ce travail.Le pire reste à faire mais j’ai bien compris maintenant que lorsqu’on commence sa vie dans l’opprobre la honte et le déni et bien c’est tout simplement presque impossible de s’affirmer, de se donner une valeur de soutenir le regard des autres…La question est :  » vais je réussir à surmonter cet handicap….Un jour? »

Je peux donc commencer à remettre en marche la machine, et mon sujet est tombé du ciel comme un coup de foudre brutal. La série sur le Deuil ma première série ne peut pas suffire à comprendre ce que veut dire être noir pour moi, je n’ai aucune idée du »comment » mais je sais pourquoi maintenant. Je dois accumuler les images (je fais toujours un tableau secret sur pinterest pour nourrir mon imagination), ensuite et bien je vais écrire, lire des textes des livres sur tous les sujets qui concernent la question du corps noir. Je ferai des dessins, des croquis .Le plus difficile étant pour moi de sortir de l’illustration pour entrer dans le projet plastique, je ne suis pas très douée pour conceptualiser  je connais mes faiblesses. il faudra que j’en joue en tout cas que je fasse avec. Je suis trop vieille pour me changer totalement j’ai trop à dire trop à montrer pour me concentrer sur la forme, je creuserai avec mes ongles jusqu’à ma mort pour dénoncer l’ignominie et l’injustice je sais que cela représente mon chemin de vie.

e Aprés avoir dénoncé MA  condition de femme. J’insiste sur ce fait parce qu’on m’a posé la question: je pars de mon nombril pour aller vers l’universel, comme une pierre qu’on jette dans l’eau et qui fait des ronds à l’infini. Je ne prétends pas que mon ressenti représente celui DES femmes en général mais j’ai bien compris par les réactions de mes amies, leur réflexions que je touche juste. Et ce n’est pas fini ce projet ne sera jamais fini tant que le patriarcat nous étouffera nous cantonnera à un rôle ornemental secondaire et passif.

Je rêve d’un autre monde pour Saskia et ses sœurs. Il sera âpre au niveau environnemental alors s’il pouvait au moins être plus juste pour chacune d’entre nous.

I’m a dreamer.

Comme je dis à chaque fois je vais essayer de venir ici plus souvent. Cette période fut pour nous toutes et tous très particulière, me concernant cela m’a rendue muette….

Je vous souhaite de bons moments. Sachez apprécier chaque jour comme des morceaux délicieux d’infini.

A bientôt n’hésitez pas à laisser des commentaires à me contacter, j’ai l’impression de travailler dans le désert, mortelle solitude.

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Sadia Diomandé

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pèle mêle familial

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Genèse projet du deuil

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Boite remplie de mes tentures brodées avec amour…Il n’y a plus qu’à….Juillet 2020.

Des choses minuscules…

Je suis en vacances, le ciel est bleu et par la fenêtre de mon bureau-atelier je peux voir les tapis de violettes parsemés dans l’herbe et quelques jonquilles qui ont vacillé sous le poids des trombes de pluie d’hier.

J’ai donné ce lien à plusieurs personnes ces temps derniers et je me suis rendue  compte que je n’avais pas écrit d’article depuis plus d’un an, déjà? Autant dire que mon blog se meurt même si il y a de quoi lire et découvrir.La lectrice, le lecteur peut se demander: « et maintenant? » Tu fais quoi….

Maintenant? Et bien je vis seule avec ma fille, Rosi le chat et la dernière arrivée Peppa une jeune labrador qui prend beaucoup de place. Hier je voulais étaler du papier kraft pour créer un patron au sol ce fut impossible: Peppa croyait que je voulais jouer avec elle, ce qui d’un point de vue canin peut se justifier.

C’est âpre c’est difficile  de vivre seule avec une adolescente qui vous fuit vous juge vous agresse aussi parfois, usant de mots blessants auxquels je n’ai pas envie de répondre car jusqu’où irions nous? La seule chose à laquelle je m’accroche c’est ma production qui est toujours aussi intense, journalière. Maintenant, je me dis qu’arrêter de produire ce serait comme cesser de respirer… Impossible.Tant mieux.

C’est bien, c’est ce qui est clair et solaire dans ma vie. Je ne vais pas m’épancher sur le reste c’est personnel et donc assez banal.

J’ai presque fini mon projet de lingettes « VDf »( un nom à travailler) , Katia K est venue me voir pour découvrir mon travail. Katia est une artiste adorable que je respecte mais que je n’aurais jamais osé solliciter. Par le biais de son neveu qui est ami de ma fille la rencontre s’est faite fin Décembre. Ce fut un grand plaisir de parler avec elle, de nos vies de notre philosophie. Elle est un mélange que j’apprécie fait de lucidité teintée d’humour et beaucoup d’humanité. Elle m’a fait pousser des petites ailes discrètes Katia (je ne peux pas en dire plus pour le moment sans la mettre dans l’embarras). Le regard d’un artiste sur un autre artiste c’est …. fondamental. Je me remémore souvent la visite de Zabou, mon dieu quel plaisir. Quelle joie intense d’être, « être soi » sans fard sans retenue et l’autre qui a du feu dans les yeux, les mots qui jaillissent et les rires cette complicité si douce …. On ne peut pas produire seul pour soi. L’art est un langage, il doit être partagé.

Le projet éco féministe est mon plus bel atout je crois, il me ressemble, il est mon miroir et quand je dis qu’il est presque fini c’est vrai et c’est faux car maintenant je brode je couds j’assemble tous les jours la peinture est redevenue secondaire et cela ne me pose aucun problème. Bien sur l’art pictural est valorisant mais je me moque de ça, je fais ce qui me semble vital, signifiant, singulier. Ce que j’ai à dire à exprimer c’est ma condition de femme artiste, exposer mes vues mes choix et réussir à le mettre en valeur.

Je suis une femme une mère et j’ai toujours eu de la peine à concilier ma vie domestique avec ma pratique de l’art… Je me sens écrasée par les tâches répétitives, ces gestes qui sont tellement minuscules que personne ne les  voient. l’investissement le temps que cela peut prendre tout cela reste un secret bien gardé.  J’ai envie de crier que j’étouffe. Non balayer tous les jours, faire la cuisine, étendre le linge, penser à charger la réserve de papier toilette ce n’est pas un plaisir, c’est juste trivial, chronophage et abrutissant.Ce ne sont pas des preuves d’amour et de dévouement comme on a bien voulu nous faire croire, quelle mascarade, un vrai marché de dupes!

Je veux décrire le monde domestique. Cerner, décortiquer ce mot « domestique » qui a plusieurs sens: il parle de l’intérieur du foyer, de l’intimité  en passant par  la servitude jusqu’à l’infériorité : quel mélange indigeste! Je veux travailler au corps les mots pour extirper du sens à ces vies gâchées, celles des femmes, la mienne pour commencer.

Domestique vs sauvage….

Je veux tenter de donner de la grandeur aux choses minuscules, les sortir de l’ombre.Y poser la lumière de mon regard.

Parallèlement j’essaie d’écrire mon « artist-statement ». En gros cela donne quelques mots quelques phrases pas vraiment dans le style « artpress » je l’avoue… Je doute que cela suffise pour un galerie mais bon je dois tenter d’imposer ma vision et du coup mes mots. Je n’ai rien à perdre.

« Dessiner comme on regarde un feu qui crépite, peindre comme on observe l’eau d’une source qui coule sans fin, broder comme on se laisse bercer par le bruit de la pluie qui tombe drue au printemps. Sans objet, tracer son sillon, vivre. »

L’idée c’est de montrer la part inconsciente répétitive, l’abandon à l’œuvre oui c’est ça.

L’abandon à l’œuvre.

Je vais essayer de reprendre l’écriture plus régulièrement.

20180722_182409« Notre Dame des Lingettes priez pour nous »!!…Mon tapis rouge, mon suaire, ma tente fait 8 mètres maintenant.

20190531_175010Œuvre constituée de mon premier chiffon de travail (entrée aux beaux arts en 1982) avec assemblage de lingettes peintes et ornées d’un motif de linogravure récurrent.2019

20191001_191734Il y aura également un grand rideau de poupées dans cette exposition pour le moment j’ai une cinquantaine de modèles que je peins à l’acrylique.20200205_205451 ce sont des objets faits en vieux draps de récupération brodés au point de bourdon .Ces figures sont toutes différentes elles seront présenter pour montrer la diversité du Féminin.La récupération de vieux drap fait écho au ravaudage du patois picard.Ravauder (v) : bricoler, passer son temps à peu de chose.Mot utilisé dans ma famille dans le sens de repriser.

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C’est ce qu’on veut faire croire…Non?

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Recherches nocturnes.Les mots sont importants…

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Tenture faite de lingettes, elles m’ont été envoyées par plusieurs amies auxquelles je rendrais hommage le jour de l’exposition sans elles je n’aurais pas pu faire ce projet.

 

Ourses Papilons

OURSES PAPILLONS

Nous de la flamme

Ou de sa nuit

Avec un arc si fin sous le front

Nous ouvrons le sol face au vide

Nous déclarons le cœur gonflé de paille chaude

Nous regardons la blancheur accompagner notre taille

Quelques bouts de soie suffisent

Une fourrure fermée

Sans craindre l’ours ou l’ivresse du papillon

Car nos yeux notre bouche traversent poupées et déjà femmes

Ensemble mais sans dépasser l’ombre de la jumelle

Nous n’avons qu’une fleur différente

Plus légères que la présence

Anonymes pour mieux rester libres

Régis Roux ; le 27 octobre 2018.

Je laisse à Régis que je remercie les mots pour décrire ma création actuelle, faite de fils de gaze, de tulle de coton ancien de petits bouts de tissus conservés avec amour, de dentelle héritées de ma grand tante. La seule ou presque dans ma famille à croire en moi et à alimenter de menus présents ma création. J’espère que là ou elle est aujourd’hui elle sourit quand elle me voit fouiller dans ma cassette à vieilles dentelles .Dentelles qui viennent de sa mère, dentelles qu’elle a avec patience décousues de vieux linges de nuit, caracos et autres culottes fendues. C’est très âpre en ce moment et je me raccroche à mes aiguilles comme à un gouvernail.

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Les quatre éléments

Depuis plusieurs années je couds je brode avec les vagues souvenirs de conseils donnés par ma grand mère lors des trop longues vacances d’été en solitaire. J’affectionne particulièrement la confection de poupées, elles ont quelque chose de fascinant.Et si on veut bien faire parler tonton Jung il y a une raison originelle à cette passion. J’en ai déjà parlé ici, lorsque j’étais âgée de 4 ans je possédais un petit poupon que j’adorais qui représentait un esquimau. Il était fait en tissu et vraie fourrure avec, si mes souvenirs ne me trahissent pas trop une tête  et les mains en porcelaine. Un jour de rage sourde je l’ai démembré, sous la table entre les grandes jambes des adultes certainement attablés pour un de ces longs repas dominicaux tellement ennuyeux pour moi, unique enfant de la famille. Je n’ai plus de détail de cet événement. Mais n’empêche, cinquante ans ont passé et je tourne encore autour  des poupées, désormais je ne les détruis plus bien au contraire je les conçois, je les couds, les assemble je leur donne vie. La boucle est bouclée et ça me va très bien.

J’ai commencé à me faire la main avec des petits animaux et puis ensuite j’ai voulu créer mes propres poupées plus proches des fétiches que des doudous pour bambins… La poupée déborde de significations: ludiques, rituelles, esthétiques. Même désacralisées elles sont les intermédiaires entre deux mondes: le vrai et le simulacre, l’animé et l’inanimé, le jouet et le fétiche, le sacré et le profane…

Toutes ces raisons et d’autres certainement obscurément liées à des phénomènes inconscients font que je me sens faite pour créer ces objets. Je deviens démiurge. La poupée parle également de la place de la petite fille future femme, d’ailleurs ce qui est drôle c’est que je n’ai pas joué « aux poupées ». Je les abandonnais à moitié dénudées sur le carrelage quand je n’avais coupé la moitié de leur chevelure pour des expériences capillaires punk avant la lettre. Je me souviens de mes tantes, de ma grand mère prenant une voix faussement attristée totalement ridicule pour me dire que je n’étais pas une »bonne maman » que mes bébés allaient prendre froid traités ainsi, je me souviens les avoir regardées d’un œil torve qui voulait dire : »vous me prenez vraiment pour une imbécile non? » et je suis polie… Je n’étais pas une petite fille « facile » mais tellement calme…. Et sage, du coup personne ne se posait la question de savoir si j’allais bien, bref.

J’ai donc commencé il y a trois ans une série de quatre poupées fétiches qui incarneraient les quatre éléments (j’ai fait des recherches dans ce sens sur la symbolique des éléments les signes dédiés tout ça).  J’ai confectionné les corps  dans une bonne toile de lin issue de vieux draps (j’en ai des kilos achetés il y a des années sur le marché aux puces à Toulouse ), à l’époque ça ne coûtait rien comme j’ai bien fait. Dans le corps rempli de ouate issu d’un vieil oreiller j’ai glissé un petit cœur d’argile des rognures d’ongles des cheveux m’appartenant (on est sorcière et on l’assume)! Ensuite je les ai tatouées sur les bras en inscrivant les signes magiques incarnant la terre l’air le feu et l’eau, puis j’ai confectionné des robes plus des sur-jupes et des ceintures dans différents tissus censés représenter les éléments invoqués: par exemple j’ai fait le choix d’une grosse bure marron pour la sous robe de Lurra (la terre en basque), celle ci porte des teintes sobres noir brun beige et elle a comme bijou un morceau de tige de fruit de camélia. Son vêtement est rigide et lourd pour symboliser les forces de la Terre.

J’ai laissé de côté ces quatre objets pendant deux ans prise par de nouveaux projets. Mais je reviens toujours sur mes pas et comme cet été j’ai pris une claque lorsque j’ai terminé mes séries picturales sans pouvoir imaginer et réaliser les encadrements qui me permettraient de les exposer au public…(allo Papa Freud vous pouvez passer mardi soir? )… J’ai été prise d’une tristesse et d’un accablement sans fond. La seule chose qui pouvait me redonner de l’énergie c’était de reprendre d’autres projets laissés en suspens. C’est une bonne chose pour moi d’avoir toujours des trucs à finir sous la main. Je quitte la peinture pour le moment pour un mois un an pour toujours je n’en sais rien. Je ne cherche pas à perdre du temps à creuser mes cendres. Je construis j’élabore je crée… Les poupées que je fabrique ont certainement une vertu curative et apaisante. En tout cas elles m’ont redonné le sourire en les voyant enfin terminées, belles pleines de mon pouvoir féminin. Elles incarnent ma force productive.

Depuis j’ai enchaîné sur la finition de calebasses modelées en papier mâché( une trentaine), elles aussi ont une fonction symbolique j’y reviendrai. Je me pose beaucoup de question pour la suite. J’ai envie de couler mes jours sur le bassin, modeler la terre faire cuire mes pots, mes lubies mes douces chimères, me promener avec le chien (que je n’ai pas encore) les pieds nus dans le sable noir et parfumé à l’iode d’Andernos ou Gujean Mestras.

Voir les saisons passer.

Rien d’autre.